Et si le CDI était une connerie ?

11-11-2013

Il semblerait que le CDI (Contrat à Durée Indéterminée) soit la solution à tout. Le CDI c'est la solution au travail précaire, le CDI c'est la solution à l'exploitation des travailleurs, le CDI c'est la solution à son prêt bancaire. Le CDI c'est la vie ©. Et si on réfléchissait un peu ? Et si le CDI était finalement ce qui nous posait le plus de soucis ?

Commençons par le début

Qu'est-ce qu'on cherche quand on veut obtenir un CDI ? On veut quelque chose de stable pour pouvoir planifier sa vie, être sûr de ce qui rentre à la fin du mois, on veut réduire les risques. On peut alors faire des projets : envisager d'acheter une maison, d'avoir des enfants, de voyager, de s'endetter. Je parle en connaissance de cause, je suis passé par là. Grosso modo, le CDI, c'est notre passeport de vie : CDI => vie facile, pas de CDI => vie galère.

Le souci c'est que ça se vérifie rarement. Il existe des personnes en CDI qui galèrent dans la vie et, inversement, des personnes sans CDI qui sont contentes de leur vie. Et ceci indépendamment des montants gagnés. On nous aurait menti ? Il semblerait même, de ma propre expérience, que les personnes qui ont choisi de ne pas subir de CDI seraient plus épanouies. Je ne dis pas que la vie est plus facile pour elles, mais au moins, leur vie a un sens et un but qu'elles se fixent elles mêmes.

Le CDI serait alors la solution de facilité. La facilité de vivre la vie que d'autres ont tracée pour nous, avant peut-être de se rendre compte que demain il sera trop tard.

La soumission à un contrat

Ce qu'il ne faut pas oublier, lorsqu'on signe un CDI en France, c'est qu'on se retrouve de fait dans une position dominant/dominé.

Tout d'abord, après s'être mis d'accord initialement sur la valeur de votre travail avec l'entreprise, cette valeur n'est que très rarement réévaluée par la suite. C'est votre salaire. Ensuite, l'entreprise détient un pouvoir quasiment unilatéral. Elle peut changer les règles du jeu sans changer le contrat : vous demander plus de travail (vous comprenez, c'est la crise), se plaindre de votre efficacité (vous n'avez pas atteint vos objectifs !), … Le salarié n'a quasi qu'un échappatoire : la démission. En effet, le contrat, après avoir été fixé à l'embauche, n'est que très rarement revu.

Vous allez me dire qu'on n'est pas obligé de rester si on n'est pas content. Ahah. C'est vrai. Le souci, c'est que tout notre conditionnement, notre domestication fait qu'on nous a toujours appris à « faire attention », à « être prudent », à « être responsable » à faire passer la sécurité avant tout. De base, on ne partira donc pas, car c'est trop risqué. Le comble, c'est que ce qui augmente ce risque, c'est le CDI et l'aliénation/dépendance qui va avec.

## N'avoir qu'un client est une très mauvaise idée

Si on démissionne sans rien avoir d'autre, on se retrouve sans aucun revenu du jour au lendemain. Car oui, en plus d'imposer un rapport malsain dominant/dominé, le CDI vous force, dans la majeure partie des cas, à n'avoir qu'un client pour vos prestations : votre employeur. Car votre employeur est en fait un client : il a acheté, via un contrat de type CDI, la valeur ajoutée que vous êtes capable de produire et dont il avait besoin pour son entreprise. Il l'a en plus achetée de manière exclusive, la classe à Dallas.

Cette exclusivité de vos services envers votre employeur est assurée de plusieurs manières. Tout d'abord, travailler 35 heures par semaine vous occupe déjà bien assez : vous n'avez plus trop d'énergie pour autre chose. Et de toute façon, le droit français ne vous autoriserait pas à travailler beaucoup plus afin de respecter la durée maximale de travail par jour et par semaine.

Ensuite, vous êtes généralement lié contractuellement via une clause d'exclusivité afin de ne pas faire concurrence à votre entreprise. Il vous est donc quasi impossible de travailler dans le même domaine à côté de votre emploi principal. La cerise sur le gâteau étant les clauses de non concurrence. Elles vont vous empêcher, contre rémunération, de faire de la concurrence à votre entreprise pendant de longs mois. C'est à dire que votre employeur a le pouvoir, lorsque vous ne serez plus dans son entreprise, de vous interdire d'aller produire votre valeur ajoutée dans une autre entreprise du même secteur.

Lorsque l'on gère une entreprise, tout le monde vous met en garde contre le client unique : si des fois vous le perdez, vous pouvez mettre la clé sous la porte, ou presque. Le problème est exactement le même lorsque vous êtes en CDI. Quand vous perdez votre employeur, vous perdez tous vos revenus.

Rester en CDI est très risqué

Rester en CDI c'est donc prendre d'énormes risques :

Et surtout, le plus grand des risques dans le CDI, c'est la perte d'autonomie et la perte de conscience de ce que vous valez. Quitter son emploi ne serait pas un problème si vous aviez assez confiance en vous pour rebondir. Si vous étiez habitué à gérer l'insécurité qui va avec.

Le problème c'est que le CDI et la pseudo-stabilité qui va avec vous a enseigné tout le contraire. Vous n'avez jamais été entraîné à gérer les situations un peu périlleuses comme celles d'avoir à retrouver un emploi. Vous avez vendu votre autonomie et votre capacité à vous auto-gérer le jour où vous avez signé votre CDI.

C'est finalement le plus grand risque du CDI : celui d'oublier que vous êtes responsable de votre vie et que chacun a quelque chose à apporter à ce monde.

Quelles solutions possibles ?

C'est bien beau tout ça, mais je fais quoi moi ?

L'idée va être ici, de ne pas succomber aux sirènes de la stabilité mode CDI. La stabilité ce n'est pas avoir un salaire fixe, travailler pour la même personne pendant des années et avoir un Contrat à Durée Indéterminée. Ça c'est au contraire une situation très instable. Toute votre vie dépend d'un seul élément : votre emploi. Et cet emploi dépend de conditions qui sont externes à vous même : la santé de votre entreprise, le bon vouloir du patron, le contexte économique. C'est comme un funambule à 100 mètres de hauteur sans filet : s'il tombe ou si la corde casse, ça risque de piquer un peu.

Il y a pour moi deux solutions au problème du funambule. Ou il faut mettre en place des filets, ou il faut changer de voie.

Protéger ses arrières

Si vous n'êtes pas encore prêts à quitter le CDI, vous avez tout intérêt à changer d'entreprise régulièrement. Plus vous vous habituerez à changer d'environnement, à vous remettre en question, moins vous aurez peur de perdre ce que vous avez. La chute risque de faire un peu peur mais, à l'instar du funambule travaillant avec filets, elle ne sera pas fatale. Vous pourrez rebondir vers quelque chose d'autre plus facilement : vous n'aurez pas été endormi par la fausse stabilité du CDI.

Il n'est pas toujours évident de trouver une autre entreprise, surtout en ces temps de crise, mais le faire en ayant un CDI est quand même bien plus confortable qu'attendre d'avoir été licencié ou d'être à bout. Ne sacrifiez pas votre santé mentale et/ou physique pour quelques euros de plus à la fin du mois. Votre vie n'attend pas.

Changer de voie

Pour reprendre l'analogie avec le funambule, l'autre façon d'éliminer le risque c'est de changer de voie. Funambule c'est bien trop dangereux, jongleur ça me parait plus raisonnable niveau risques. Il en va de même pour le CDI. Le CDI est beaucoup trop dangereux, être à son compte (freelance, entrepreneur, appelez ça comme vous voulez) est bien moins risqué.

Vous décidez vous-même de la valeur ajoutée que vous pouvez apporter au monde. Vous en fixez le prix et vous pouvez la délivrer à plusieurs clients à la fois. Si vous perdez un client peu importe, vous pourrez toujours en retrouver d'autres.

Vu comme ça, ça peut paraître idyllique, mais je ne vous la fais pas à vous. C'est évidemment plus compliqué que cela, mais le principe est là. Je ne prétends pas que cette solution soit adaptée à tout le monde car elle nécessite un pré-requis : un énorme travail sur soi.

J'ai longtemps essayé de me mettre à mon compte sans grand succès. J'avais toujours les bonnes excuses : je ne gagnerais pas assez d'argent pour nourrir ma famille, c'est risqué, … Tout ça pour finalement me rendre compte que la seule chose qui me manquait c'était de la confiance en moi. Et la bonne nouvelle c'est que ça se travaille. Vous pouvez par exemple consulter ma sélection d'articles et de livres sur le sujet, c'est un bon début.

J'ai mis quelques années à y parvenir mais je ne reviendrais pour rien au monde à l'asservissement que requiert la position d'employé en CDI. Je crois que le déclic s'est produit le jour où j'ai compris que moi aussi j'avais quelque chose à apporter à ce monde et que c'était d'ailleurs pour cette raison qu'on m'embauchait. Partant de là, je me suis demandé pourquoi j'avais besoin de quelqu'un qui m'embauche en tant que salarié pour que je puisse exprimer mes talents. Qu'est-ce qui me manquait pour que je puisse le faire de manière autonome ? Pas grand chose, juste un peu de temps libre pour travailler sur moi et comprendre les raisons pour lesquelles mes futurs clients pouvaient me faire confiance.

Et l'avenir dans tout ça ?

Personnellement je souhaite que tout le monde puisse grandir intérieurement de manière à pouvoir révéler ce que chacun à offrir à ce monde. Je serais vraiment curieux de voir ce qui émanera de chaque personne le jour où elle pourra pleinement exprimer son potentiel et n'aura pas à occuper un emploi bidon de type CDI pour survivre.

Comme j'en avais déjà parlé ici, la bonne nouvelle c'est que nous manquons enfin de travail. Nous avons enfin pu automatiser la majorité des tâches qui permettent la survie. Il est donc possible que les générations à venir n'aient plus à se demander comment elles pourront faire pour subvenir à leurs besoins vitaux. Il est possible que leur seule préoccupation soit celle de se développer en tant que personne humaine.

Peut-être qu'un jour, sur cette planète, chacun pourra contribuer de manière utile et choisie au monde qui l'entoure. Peut-être que plus personne n'aura à se renier pour survivre. Utopie ou monde de demain ? Allez vous renseigner vous-même : le revenu de base.